L’art est présent depuis les plus anciennes civilisations. Il est le témoin de notre histoire, de notre culture, de nos émotions. Cependant, une question divise souvent les amateurs et les initiés: l’art s’apprend-il ? Certains soutiennent qu’il serait le fruit d’une sensibilité innée, d’une capacité à percevoir et exprimer le monde d’une manière unique, tandis que d’autres arguent qu’il s’agit d’un savoir-faire technique qui s’acquiert avec le temps et l’enseignement. De plus, le processus créatif en lui-même suscite le débat. Peut-on véritablement apprendre à créer ? Ou est-ce simplement un élan de l’esprit qui se libère ? Il semble donc intéressant d’explorer ces thématiques, en cherchant à déterminer l’importance respective de la technique et de la sensibilité dans l’apprentissage de l’art, le rôle de l’apprentissage dans le processus créatif, et enfin, la dualité entre la nature et la culture dans la formation artistique. Pour ce faire, nous explorerons quatre axes de réflexion principaux.
I. Apprendre l’art : une question de technique ou de sensibilité innée ?
L’art, pour le commun des individus, est souvent considéré comme une évasion du réel. Il est associé à une certaine sensibilité, une particularité intrinsèque de l’artiste lui permettant d’exprimer ses sentiments, sa vision du monde sur une toile, une sculpture ou au travers de notes de musique. Cette sensibilité serait-elle un don inné ou une compétence acquise ? C’est dans cet esprit que nous devons interroger la possibilité d’apprendre l’art.
Par l’apprentissage technique, l’artiste acquiert les outils qui lui permettent de matérialiser son inspiration. Que ce soit l’apprentissage du maniement du pinceau, la connaissance des couleurs, le contrôle du son, chaque discipline artistique a sa propre technique qui lui est propre. Cette compétence technique devient ainsi une sorte de langage utilisé par l’artiste pour exprimer ses sentiments, créer une œuvre d’art.
Néanmoins, l’apprentissage technique ne suffit pas à faire naître une œuvre d’art. L’art n’est pas qu’une simple imitation du réel, il nécessite un talent original, une certaine sensibilité. Il serait difficile de programmer un robot pour créer une symphonie de Beethoven ou un tableau de Van Gogh. Les émotions de l’artiste sont des éléments intimes, peut-être innés, qui le poussent à créer.
II. L’art, un savoir-faire manuel qui s’acquiert ou une expression de l’esprit qui se libère ?
L’art est souvent envisagé comme un savoir-faire manuel. En effet, la maîtrise de la technique manuelle est un prérequis pour la création artistique. Juste comme le chirurgien doit apprendre à manipuler son scalpel, l’artiste doit apprendre le maniement de son outil de travail (peinture, sculpture, musique) afin de pouvoir se plonger dans l’univers artistique.
L’artiste qui maîtrise son savoir-faire manuel peut alors libérer sa créativité. La technique, à cet effet, n’est que l’instrument qui permet à l’artiste de transcender son imaginaire, de lui donner vie. L’art ne se réduit donc pas à la seule maîtrise technique, il est aussi l’expression d’une liberté, celle de l’esprit artistique se déployant à travers l’objet artistique.
Cependant, la créativité artistique peut-elle s’apprendre de la même manière qu’un savoir-faire manuel ? La question demeure ouverte. Selon le philosophe Hegel, « l’art exige des artistes non seulement une habileté et une science techniques, mais d’abord et avant tout une inspiration et une illumination intérieures ». L’art serait donc non seulement un savoir-faire à acquérir mais aussi un esprit à libérer.
III. Les limites de l’apprentissage en art : la création peut-elle être enseignée ?
La question du possible apprentissage de l’art renvoie à une autre question plus profonde : la création peut-elle être enseignée ? Si la maîtrise technique et le savoir-faire manuel semblent être des compétences acquises, la capacité à créer semble relever de l’inconnu, de l’intuition.
Peut-on alors enseigner l’innovation et l’inventivité ? L’un des problèmes majeurs de l’enseignement artistique est qu’il repose essentiellement sur la répétition et l’imitation de techniques et de styles existants. Cela peut étouffer la créativité en favorisant la conformité et le formalisme.
Pour Picasso, un véritable artiste est celui qui crée à partir d’une vision qui lui est propre. Il affirmait : « Je n’évolue pas, je suis. Il n’y a, en art, ni passé, ni futur. L’art qui n’est pas dans le présent ne sera jamais. » Ces paroles laissent entendre que l’authenticité artistique, la liberté créative, ne peuvent être enseignées, elles émergent de la présence de l’artiste à lui-même et à son monde.
IV. La dualité entre la nature et la culture dans la formation artistique.
L’art est souvent réfléchi à l’aune de la dichotomie nature/culture. La nature renverrait ici aux dispositions innées, au talent naturel que chaque individu possèderait à des degrés divers, tandis que la culture évoquerait tout ce que l’on peut acquérir par l’éducation et l’apprentissage.
En tant que forme de création humaine, l’art est indéniablement le produit de la culture. Que ce soit une technique de pinceau, une pratique musicale ou une méthode de sculpture, chaque forme d’expression artistique est le fruit d’une tradition culturelle, qui se transmet d’une génération à l’autre.
Néanmoins, la nature joue également un rôle crucial dans l’expression artistique. Que serait l’art sans la sensibilité personnelle, l’aptitude innée à percevoir et à exprimer les expériences vécues ? L’artiste, tout en utilisant les outils culturels à sa disposition, déploie sa créativité naturelle pour émettre une proposition esthétique, pour créer quelque chose de nouveau.
Conclusion
Pour conclure, il n’est pas évident de trancher sur le débat selon lequel tout s’apprend en art. Pourtant, la dissertation a mis en lumière que l’art représente autant un savoir-faire technique qu’une expression de l’âme. Sous un aspect, l’art s’apprend en ce que l’on acquiert des compétences qui permettent de créer. Ceci implique la maîtrise technique, nécessaire mais pas suffisante. En outre, l’art est une émanation de l’intérieur de l’artiste, un espace de liberté que les formations ne peuvent créer nées de plein fouet. D’un autre côté, tant la culture que la nature influent indéniablement sur le développement artistique. Ainsi, l’art est intrinsèquement lié à l’identité, aux expériences de vie, aux émotions et à la sensibilité individuelle. L’apprentissage a sa place, mais il est limité par la capacité de l’individu à créer et à exprimer sa vision unique du monde. L’art ne se limite donc pas à une simple somme de connaissances et de compétences, mais demande une ouverture d’esprit et une réponse émotionnelle qui dépasse tout enseignement.