En politique, tous les moyens sont-ils bons ?

image_pdfTélécharger ce corrigé

Dans le monde de l’engagement public et du pouvoir, la question de l’éthique et des moyens employés pour atteindre des objectifs politiques est un sujet de débat courant et complexe. « En politique, tous les moyens sont-ils bons ? » est une interrogation qui nous amène à aborder la dimension réaliste de la politique, instaurant parfois une vision pragmatique dominante où tous les moyens semblent justifiés pour parvenir à des fins. Cependant, il semble également impératif de discuter de la question de l’éthique en politique, un principe qui vise à instaurer une certaine moralité dans l’usage des moyens politiques. Pour ce faire, plusieurs exemples concrets, tirés de l’histoire et de l’actualité, seront évoqués pour démontrer comment la politique a exploité divers moyens pour atteindre ses fins. Enfin, la dissertation proposera une réflexion critique sur la nécessité de réinsérer l’éthique dans la pratique politique, afin de favoriser l’emploi de moyens justes pour des fins tout aussi justes.

I. Analyse du principe réaliste de l’emploi de tous les moyens en politique

L’école de pensée réaliste, qui domine souvent dans la politique internationale, soutient l’idée que la fin justifie les moyens. Dans cette perspective, tout moyen est considéré comme valable si l’objectif est jugé nécessaire ou bénéfique. Cela implique souvent l’usage de la force, de la persuasion, de la manipulation et parfois de la trahison.

Une telle approche, bien que critiquée pour son manque de moralité, trouve encore des partisans parmi ceux qui considèrent l’éthique comme un luxe qu’un individu ou un État ne peut pas se permettre en politique. Pour ces derniers, Machiavel est le précurseur de cette philosophie de la politique, du moins dans la manière dont ils interprètent son oeuvre, « Le Prince ». En effet, Machiavel avance que les dirigeants doivent faire tout ce qui est nécessaire pour maintenir le pouvoir et l’ordre – même s’ils doivent utiliser des méthodes amorales ou impopulaires.

Pourtant, même si de nombreux acteurs politiques suivent ce principe, cela soulève de sérieux problèmes éthiques. Cette approche peut justifier des actions comme le mensonge, la manipulation, la violence où les violations des droits de l’homme. C’est pourquoi beaucoup voient le réalisme en politique comme un signe de cynisme et une menace à la justice sociale et à la paix.

II. L’éthique en politique: la recherche d’une frontière morale dans l’utilisation des moyens

L’éthique est un domaine de la philosophie qui s’intéresse à la morale, et par conséquent, elle peut jouer un rôle important dans le débat sur les moyens acceptables en politique. En effet, certains philosophes politiques tels que Platon, Thomas More ou encore Rawls mettent l’accent sur la justice et le bien commun comme principes fondateurs de la politique. Ils considèrent que l’éthique ne peut être mise de côté au profit de la réalisation d’objectifs politiques.

Selon Kant, par exemple, il existe un principe moral universel, qu’il appelle impératif catégorique, selon lequel nous devrions toujours agir de telle manière que nous puissions vouloir que notre action devienne une loi universelle. Appliqué à la politique, cela signifie que chaque acte politique ne devrait pas seulement être jugé en fonction de ses résultats, mais surtout en fonction de sa conformité aux principes moraux universels.

Toutefois, l’application stricte de principes éthiques peut parfois entraver l’efficacité politique, par exemple en empêchant de prendre des mesures rapides en cas de menace ou de crise. C’est pourquoi beaucoup pensent qu’il doit y avoir une sorte de compromis entre éthique et politique, où l’objectif serait de faire le moins de mal possible pour atteindre un bien plus grand.

III. Exemples historiques et contemporains de l’exploitation des moyens en politique

L’histoire et la réalité contemporaine fournissent de nombreux exemples de l’exploitation de tous les moyens en politique. Tout d’abord, l’élimination brutale des adversaires politiques par Staline ou l’utilisation de la propagande par Hitler pour manipuler l’opinion publique constituent des exemples clairs de l’utilisation de tous les moyens pour parvenir à des fins politiques.

Plus récemment, la guerre en Irak a été justifiée par les Etats-Unis sur la base de fausses informations concernant les armes de destruction massive de l’Irak. Cela a entraîné une invasion qui a coûté la vie à des centaines de milliers de personnes et a déstabilisé la région pendant des années.

Au niveau national, il n’est pas rare que les politiciens utilisent des tactiques de diffamation, de manipulation de l’information ou de diversion pour gagner des élections ou maintenir leurs positions de pouvoir. Ces exemples montrent que l’utilisation de tous les moyens en politique est courante, malgré les contestations et les controverses qu’elle provoque.

IV. La nécessité d’une réinsertion de l’éthique dans la pratique politique : des moyens justes pour des fins justes

Si l’on veut éviter les abus de pouvoir et les injustices inhérents à l’utilisation de tous les moyens en politique, il est nécessaire de réinsérer l’éthique dans la pratique politique. Cela signifie que les acteurs politiques devraient être guidés par des principes moraux et éthiques, qui limiteraient les actions qu’ils sont autorisés à prendre.

En cela, ils seraient en phase avec la philosophie de Rawls qui défend l’idée de la justice comme équité. Selon Rawls, les institutions politiques doivent être structurées de façon à assurer le bien-être et le respect des droits fondamentaux de toutes les personnes, indépendamment de leur position sociale.

Cela ne signifie pas qu’il faille renoncer à toute forme de réalisme en politique. Il est possible d’adopter une approche pragmatique tout en restant conforme aux principes éthiques. Cela peut impliquer des compromis et des calculs stratégiques, mais dans les limites imposées par la moralité et le respect des droits de l’homme.

En conclusion, alors que « tous les moyens sont bons » peut être une devise séduisante pour certains acteurs politiques, cela ne devrait pas être la norme dans une société démocratique et équitable. L’incorporation de principes éthiques dans la politique est nécessaire pour garantir que les actions des dirigeants sont en accord avec l’intérêt du peuple et les principes de justice et de respect des droits de l’homme.

Conclusion

En conclusion, il apparaît clair qu’assertion selon laquelle « en politique, tous les moyens sont bons » doit être nuancée. Si le réalisme politique inclut l’idée que certains moyens peu éthiques peuvent être utilisés pour atteindre un objectif, l’éthique en politique rappelle l’importance d’une frontière morale dans l’utilisation de ces moyens. Les divers exemples historiques et contemporains de l’exploitation des moyens en politique soulignent à la fois la tentation de recourir à tous les moyens possibles, qu’ils soient justes ou non, et les conséquences souvent dévastatrices de cette approche. Pourtant, la politique n’est pas un jeu sans règles : elle a un impact profond sur la société, ce qui rend indispensable une réflexion sur l’éthique. Il semble donc nécessaire de réinsérer l’éthique dans la pratique politique, afin d’utiliser des moyens justes pour atteindre des fins justes. Le défi, cependant, sera d’établir et de faire respecter ces normes éthiques dans un monde politique de plus en plus polarisé et conflictuel.