La science est un domaine qui cherche constamment à élucider les mystères de notre monde. Elle procède par la formulation d’énoncés, issus d’hypothèses, qui sont ensuite testés et vérifiés. Cependant, une interrogation persiste : ces énoncés scientifiques peuvent-ils être considérés comme des vérités ? La réponse à cette question réside, en partie, dans l’analyse de la nature même de ces énoncés et du concept de vérité (Section I). Nous nous pencherons ensuite sur la méthodologie scientifique qui, allant de l’hypothèse à l’énoncé vérifiable, est censée nous rapprocher de la vérité (Section II). Cependant, la vérité scientifique peut être éphémère et sujette à modification, menant à une notion de vérité temporaire et relative (Section III). Enfin, nous conclurons en examinant les limites et le questionnement constant de la vérité scientifique (Section IV), pour tenter de répondre globalement à notre problème.
I. Analyse préliminaire des énoncés scientifiques et définition du concept de vérité
Les énoncés scientifiques
Dans une première approche, il importe de préciser ce que l’on désigne précisément par énoncés scientifiques. C’est-à-dire, des faits exprimés dans un langage spécifique, servant de base à l’élaboration des théories dans les différents champs du savoir scientifique. Ils sont l’objet d’observations, d’expériences ou de déductions, indépendamment de toute interprétation subjective. Ainsi, les énoncés scientifiques peuvent être relativement simples (« La Terre tourne autour du Soleil ») ou incroyablement complexes, abordant des aspects de la réalité accessibles uniquement à travers de puissants instruments ou des équations mathématiques.
Le concept de vérité
Le concept de vérité, quant à lui, est plus insaisissable. Les philosophes ont depuis des siècles cherché à le définir et si l’on suit Platon, la vérité serait « ce qui est ». C’est à dire la réalité authentique, sans voile, sans illusion. Toutefois, ce concept est souvent sujet à des interprétations diverses et changeantes. Ainsi, selon une vision plus pragmatique, la vérité peut être définie comme ce qui fonctionne, ce qui produit des effets.
Le rapport entre énoncés scientifiques et vérité
C’est dans le rapport entre ces deux concepts que réside la question de cette dissertation. Les énoncés scientifiques, sont-ils des vérités ? Si oui, selon quelle définition de la vérité ? Sont-ils des vérités absolues, immuables, ou des vérités contingentes, temporaires ? Pour répondre à ces questions, il faut d’abord examiner le processus par lequel ces énoncés sont formés, c’est-à-dire le parcours méthodologique de la science.
II. La méthodologie scientifique : de l’hypothèse à l’énoncé vérifiable
Du questionnement initial à l’hypothèse
La démarche scientifique commence généralement par un questionnement, une interrogation sur un phénomène ou une réalité donnée, conduisant à l’établissement d’une hypothèse. Comme le souligne Karl Popper, célèbre philosophe des sciences, une hypothèse en science doit être potentiellement réfutable. Autrement dit, si une hypothèse ne peut être mise à l’épreuve et donc possiblement réfutée, elle ne relève pas du domaine scientifique.
De l’hypothèse à l’expérimentation
Une fois l’hypothèse posée, vient l’étape de l’expérimentation qui tente de tester l’hypothèse par l’observation ou des manipulations sur la réalité. Cette étape de la démarche scientifique est capitale car l’expérimentation va soit valider l’hypothèse, soit l’invalider, la réfuter.
De l’expérimentation à l’énoncé vérifiable
Si l’expérimentation semble confirmer l’hypothèse, celle-ci peut alors être reformulée en un énoncé scientifique. Cependant, la vérifiabilité est un critère fondamental en science. Ainsi, un énoncé scientifique est toujours amendable, toujours susceptible d’être remis en question par de nouvelles observations ou de nouvelles expériences.
III. La stabilisation des énoncés scientifiques : vers une vérité temporaire et relative
La stabilisation des énoncés
L’énoncé scientifique, bien qu’il soit toujours amendable, peut atteindre un certain niveau de stabilité. Ce ne sera plus simplement une proposition, une visée de la vérité, mais une formulation reconnue et acceptée par la communauté scientifique, car elle a passé avec succès le test de la vérification empirique.
La vérité temporaire
On peut donc dire que l’énoncé scientifique stabilisé peut être considéré comme une vérité, mais une vérité d’un type particulier : une vérité temporaire, ou provisoire, ouverte à la révision future. C’est en ce sens que Popper parle de « corroboration » plutôt que de « confirmation » des hypothèses : une hypothèse n’est jamais définitivement confirmée, elle est seulement corroborée, c’est-à-dire qu’elle a jusqu’ici résisté aux tentatives de réfutation.
La vérité relative
Outre le temporaire, cette vérité montre aussi une autre caractéristique qui est sa relativité. Ce qui veut dire que les énoncés scientifiques n’expriment pas une vérité universelle et immuable mais une vérité qui est fonction d’un cadre théorique, d’une épistémologie, d’un langage, de méthodes…
IV. Les limites et le questionnement permanent de la vérité scientifique
Le questionnement permanent
Comme mentionné précédemment, les énoncés scientifiques sont toujours sujets à révision. Le questionnement permanent est une caractéristique fondamentale de l’activité scientifique. Ainsi, même les énoncés les plus stables, ceux qui sont acceptés comme de « bonnes approximations de la vérité », sont susceptibles d’être remis en question.
La crise des fondements
Au-delà des questionnements sur des points de détail, la science peut également connaître des crises de fondements, où c’est toute une théorie qui est remise en question, comme ce fut le cas pour la physique newtonienne avec l’avènement de la théorie de la relativité d’Einstein.
Limites de la vérité scientifique
Enfin, il faut mentionner les limites intrinsèques à la vérité scientifique. Comme le soulignait Kant, la science ne peut atteindre que les phénomènes, c’est-à-dire ce qui apparaît, ce qui se manifeste à nous. Le « noumène », c’est-à-dire la chose en soi, demeure inaccessible. Ainsi, même si les énoncés scientifiques peuvent être considérés comme des vérités relatives et temporaires, ils ne nous permettent pas d’accéder à « la » Vérité, à une connaissance absolue et définitive de la réalité.
Conclusion
En conclusion, l’appréhension de la vérité au sein de la science est complexe et multifacette. Les énoncés scientifiques, nourris par des hypothèses, des expériences et des validations, forment une quête continuelle de la vérité, marquée par des vérités provisoires et relatives. Certes, le processus méthodologique rigide qui guide la production d’un énoncé scientifique, de l’hypothèse à sa vérification, cherche à minimiser les erreurs et à maximiser l’objectivité. Cependant, la stabilité de ces énoncés reste vulnérable à l’amélioration constante et à la découverte de nouvelles données ou technologies. Cette dynamique insuffle un caractère évolutif à la vérité scientifique, la plaçant loin de l’immuabilité qui caractérise parfois le concept de vérité au sens absolu. De plus, les limites inhérentes à la science et le questionnement continu font d’elle un domaine qui se remet constamment en question, affinant sans cesse sa quête de la vérité. Il est donc essentiel d’appréhender les énoncés scientifiques comme des vérités sous réserve de modifications futures, soulignant ainsi leur caractère provisoire et en constante évolution.