Appliquer des lois justes suffit-il pour assurer la justice ?

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La justice est un idéal moral et éthique suprême vers lequel toutes les sociétés tendent en instaurant des règles et des normes de conduite, connues sous le nom de lois. L’application de ces lois est censée garantir l’équité et l’impartialité dans la gestion des affaires publiques et privées. Mais la question qui se pose est la suivante : Appliquer des lois justes suffit-il pour assurer la justice ? Pour tenter de répondre à cette question, cette dissertation se penchera d’abord sur la définition et la portée de la notion de loi juste, avant de considérer l’importance de mettre en œuvre ces lois de manière effective. Cependant, il est nécessaire de garder à l’esprit qu’il peut y avoir des limites et des contraintes à l’application des lois justes. Enfin, nous explorerons l’idée d’une approche plus holistique de la justice, qui tente de regarder au-delà de la simple application de lois justes.

I. Définition et portée de la notion de loi juste

La loi, dans son acception la plus courante, est un ensemble de règles édictées par un pouvoir légitime, et qui visent à organiser la vie en société. Elle est censée être universelle, c’est-à-dire s’appliquer à tous sans distinction, et impartial, c’est-à-dire être objective et non biaisée.

Mais qu’entend-on par loi juste ? Une loi peut-elle être injuste ? On tend généralement à associer la notion de justice à un idéal d’égalité et d’équité. Une loi juste serait donc une loi qui promeut et garantit ces valeurs. Elle est souvent considérée comme un idéal à atteindre, une aspiration de toute société qui se veut équitable et équilibrée.

Cependant, la notion de justice n’est pas unanime et varie d’une culture, d’une époque à une autre. Les philosophes antiques, par exemple, l’ont défini comme le respect de l’ordre établi (Platon, La République), ou comme le respect du mérite de chacun (Aristote, Ethique à Nicomaque). Plus récemment, le philosophe John Rawls a considéré la justice comme l’équité (Une Théorie de la justice).

II. La mise en œuvre des lois justes : une étape essentielle vers la justice

La promulgation des lois justes n’est qu’une première étape vers la réalisation de la justice. Encore faut-il qu’elles soient mises en œuvre et respectées.

Comment cela se traduit-il concrètement ? Par la mise en place de mécanismes d’application de la loi, comme les tribunaux et les forces de l’ordre, mais aussi par la volonté de chacun de respecter les règles établies. L’application de la loi juste passe donc par une certaine adhésion du corps social à ces règles, afin d’assurer leur respect.

L’application de la loi est également une question de compétence et d’expertise. Elle nécessite des connaissances juridiques et une capacité d’interprétation de la loi. En outre, elle réclame une capacité à saisir la complexité des situations pour lesquelles la loi est appelée à trancher.

Cependant, l’application des lois justes ne garantit pas forcément la réalisation de la justice au sens large. Et cela pour plusieurs raisons que nous allons aborder dans la section suivante.

III. Les limites et contraintes de l’application des lois justes

L’application de la loi présente plusieurs limites qui peuvent empêcher la réalisation de la justice.

Premièrement, le droit positif (les lois en vigueur dans un Etat) ne recouvre pas toute la notion de justice. Il existe une certaine relativité de la justice et du droit positif par rapport à la culture et aux valeurs d’une société donnée.

Deuxièmement, même si la loi est juste et bien appliquée, elle peut ne pas suffire à réaliser la justice. Par exemple, une loi qui garantirait l’égalité des chances ne serait pas suffisante en l’absence de politiques publiques appropriées pour corriger les inégalités sociales existantes.

Troisièmement, l’application de la loi peut elle-même être source d’injustice, notamment à cause des erreurs judiciaires ou de la partialité des juges. Montesquieu, dans L’Esprit des lois, a souligné cette difficulté en affirmant que « c’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites ».

IV. Vers une approche plus holistique de la justice : au-delà de l’application des lois justes.

Pour pallier ces limites, il est nécessaire d’adopter une approche plus holistique de la justice. Elle concerne tout autant le processus législatif, l’application de la loi, mais également des dimensions plus larges comme les structures socioéconomiques et les pratiques culturelles.

Une telle approche de la justice implique une réflexion sur les conditions d’une société juste. Cela se traduit, entre autres, par la promotion de l’égalité des chances, la lutte contre les inégalités socio-économiques et la promotion d’une culture du respect et de la tolérance.

Elle nécessite également un travail constant de révision et de mise à jour des lois, afin de s’assurer qu’elles répondent toujours aux aspirations de justice de la société.

Enfin, la réalisation de la justice requiert une implication de tous les acteurs de la société : de l’Etat, qui doit veiller à l’équité des lois et à leur application, mais aussi des citoyens, qui doivent participer activement à ce processus et veiller au respect des règles établies.

Si l’application des lois justes est une étape nécessaire, elle n’est pas suffisante pour assurer la justice. Elle nécessite une approche holistique qui prenne en compte les dimensions structurelles et culturelles de la société.

Conclusion

En conclusion, la justice ne peut être atteinte par la simple application de lois justes. L’application de ces lois constitue certes une étape fondamentale vers la justice, mais elle est loin d’être suffisante. Les lois justes se heurtent à des limites et des contraintes, notamment en termes de formulation, d’interprétation et d’application. Pour une réalisation effective de la justice, une approche plus holistique est requise. Cela implique de prendre en compte non seulement la loi, mais aussi d’autres aspects tels que la morale, l’équité, et les contextes socioculturels. De plus, pour éviter toute potentiel dérive tyrannique ou absolutiste, la primauté du Droit doit être défendue et le pouvoir législatif doit être contrebalancé par d’autres pouvoirs. En somme, si les lois justes sont nécessaires à la justice, elles ne sont pas suffisantes. Il faut une volonté constante d’améliorer les systèmes juridiques, la formation des individus à la citoyenneté, et une réflexion permanente sur ce qui fait la justice dans nos sociétés.

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